Depuis toujours, je lis comme je partirais à la cueillette de champignons.
Sauf que je déteste les champignons.
Non, ce que j’aime dénicher parmi les feuilles, ce sont les jolis morceaux d’écriture. En ce qu’ils disent, ou comment ils le disent.
Pour cette raison, je lis difficilement un livre qui ne m’appartient pas. Lire le livre d’un autre, c’est s’imposer une logistique sans faille ; grosso modo un sac à main toujours rempli de ce qu’il faut de crayon, de post-it ou de carnet, pour extraire l’éventuelle pépite sans laisser aucune trace.
Au vu de ce que contient déjà le mien, je m’en tiens à des méthodes peu sophistiquées, mais efficaces. Au moment de la découverte, je griffonne un signe dans la marge, et marque la page d’une corne large.
Sans trembler, j’abîme ainsi mes livres au fur et à mesure de mes pérégrinations, heureuse de pouvoir contempler, au final et en un seul coup d’œil, autant de traces qu’il y eut de moments heureux. Ces moments où, plus ou moins confortablement installée dans un livre, j’ai basculé de la lecture à la contemplation.
Le photographe a sûrement ce même sentiment lorsque, au détour d’un chemin, il est ému par un simple caillou, entouré qu’il est par ce qu’il faut de paysage, de mystère ou de lumière. Son mérite est alors de savoir attraper une vision éphémère, menacée de distorsion immédiate par un million de paramètres.
Le mien est nul. Les phrases lues ne bougent pas.
Quelle que soit l’allure qu’elles auront sorties de leur contexte, il est facile de les recopier à l’identique.
C’est ainsi, de mon admiration pour les petits morceaux des grands touts, qu’est née l’envie de collectionner le morceau d’écriture.
Je l’entrepose ici, dans telle ou telle catégorie, parfois encadré de quelques lignes, parfois d’une image.
Je scande en tous les cas inlassablement ma conviction :
Reprendre la part belle au diable / Le beau, aussi, se cache dans les détails.